Chapitre I
L’ENFANT, UN ÊTRE À FORMER
NOUVEAUX LIEUX, NOUVELLES INSTITUTIONS
DES RÉGENTS ET D’ANCIENS ÉLÈVES TÉMOIGNENT
BIBLIOTHÈQUE SONORE
Dresser, éduquer, civiliser
Peu de choses sépare le petit enfant du jeune chiot avec lequel il prend plaisir à jouer. C’est ce qui apparaît à la lecture du chapitre sur la prime enfance du géant Gargantua : celui-ci laisse ses frétillants compagnons de jeux se servir sans vergogne dans son écuelle et se frotte à eux dans des caresses réciproques où des babines sont léchées et des nez égratignés.
Que l’enfant et le chiot aient beaucoup en commun, c’est aussi ce que laisse entendre le contemporain de Rabelais qu’est l’humaniste Juan Luis Vivès (1492-1540). Dans ses Dialogues latins (1538), dont le propos est très concret, sont abordées les règles d’hygiène concernant l’enfant : comment se peigner, se laver, se vêtir. On y évoque aussi les règles de maintien dans les situations de la vie quotidienne : se tenir droit, faire la révérence, être modeste et circonspect devant un supérieur, etc.
L’auteur brosse autant de petites scènes prises sur le vif. Ce faisant, nous voici dans le foyer du jeune Tullius : le garçon est accueilli par son petit chien, Ruscio, qui lui fait fête en remuant la queue. Alors que l’enfant, tout excité, propose à manger à son chien tout en s’extasiant sur son intelligence, le père du garçon intervient et lui demande s’il pourrait dire en quoi il est vraiment différent de son animal de compagnie. L’enfant reste perplexe. En vérité, tant qu’il n’est pas allé à l’école, il tient de la bête plus que de l’homme. C’est pourquoi le père s’empresse de conduire son fils au collège et en saluant le maître, il a ce mot révélateur : J’amène ce mien fils vers vous, afin que d’une bête vous fassiez un homme.
À partir du XVIe siècle, se multiplient en Europe les manuels de civilité et autres traités de savoir-vivre à destination des jeunes personnes. Pas question de laisser son fils traîner dans les rues et s’adonner au jeu, comme le font les gueux ou les jeunes pages débauchés des romans picaresques du XVIIe siècle.
L’institution scolaire est concernée, mais aussi la vie domestique. Traitant de la civilité morale des enfants, Erasme ne se contente pas de mettre l’accent sur la piété qui sied à l’enfance: : il condescend à parler de choses aussi triviales que de la manière de se moucher ou d’éternuer. C’est que la connaissance de l’alphabet, puis la pratique des arts libéraux ne sont pas dissociables de l’acquisition des bonnes manières. Rien n’échappe à l’attention des éducateurs, rien n’est laissé au hasard : de la posture assise à la manière de tenir sa plume, tout se doit d’être maîtrisé pour faire de l’enfant autre chose qu’un singe costumé.
Dans le même temps, le XVIe siècle découvre qu’une tout autre enfance est possible, sous d’autres latitudes : des accouchements ont lieu sans recourir à aucune sage-femme ; un père s’occupe lui-même de nouer le cordon du nombril ; aucun nouveau-né n’est emmailloté dans des langes ni allaité par une nourrice. Si c’est un mâle, l’enfant est placé dans un hamac avec, à ses côtés, une petite épée de bois, un petit arc et de petites flèches garnies de plumes de perroquet. Cela se passe dans la baie de Rio de Janeiro où Jean de Léry a passé plusieurs mois, accueilli par une tribu « sauvage », en 1557-1558.
Quand ils grandissent, les garçonnets tupinambas évoluent à l’aise dans des corps fermes, souples, potelés qui émerveillent l’auteur de l’Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil (1578). Cette « petite marmaille » a l’esprit délié et des mouvements aussi vifs que les lapins de garenne de chez nous. Ni les arts libéraux ni les cours de maintien ne semblent lui manquer beaucoup…
Dresser, éduquer, civiliser
Peu de choses sépare le petit enfant du jeune chiot avec lequel il prend plaisir à jouer. C’est ce qui apparaît à la lecture du chapitre sur la prime enfance du géant Gargantua : celui-ci laisse ses frétillants compagnons de jeux se servir sans vergogne dans son écuelle et se frotte à eux dans des caresses réciproques où des babines sont léchées et des nez égratignés.
Que l’enfant et le chiot aient beaucoup en commun, c’est aussi ce que laisse entendre le contemporain de Rabelais qu’est l’humaniste Juan Luis Vivès (1492-1540). Dans ses Dialogues latins (1538), dont le propos est très concret, sont abordées les règles d’hygiène concernant l’enfant : comment se peigner, se laver, se vêtir. On y évoque aussi les règles de maintien dans les situations de la vie quotidienne : se tenir droit, faire la révérence, être modeste et circonspect devant un supérieur, etc.
L’auteur brosse autant de petites scènes prises sur le vif. Ce faisant, nous voici dans le foyer du jeune Tullius : le garçon est accueilli par son petit chien, Ruscio, qui lui fait fête en remuant la queue. Alors que l’enfant, tout excité, propose à manger à son chien tout en s’extasiant sur son intelligence, le père du garçon intervient et lui demande s’il pourrait dire en quoi il est vraiment différent de son animal de compagnie. L’enfant reste perplexe. En vérité, tant qu’il n’est pas allé à l’école, il tient de la bête plus que de l’homme. C’est pourquoi le père s’empresse de conduire son fils au collège et en saluant le maître, il a ce mot révélateur : J’amène ce mien fils vers vous, afin que d’une bête vous fassiez un homme.
À partir du XVIe siècle, se multiplient en Europe les manuels de civilité et autres traités de savoir-vivre à destination des jeunes personnes. Pas question de laisser son fils traîner dans les rues et s’adonner au jeu, comme le font les gueux ou les jeunes pages débauchés des romans picaresques du XVIIe siècle.
L’institution scolaire est concernée, mais aussi la vie domestique. Traitant de la civilité morale des enfants, Erasme ne se contente pas de mettre l’accent sur la piété qui sied à l’enfance: : il condescend à parler de choses aussi triviales que de la manière de se moucher ou d’éternuer. C’est que la connaissance de l’alphabet, puis la pratique des arts libéraux ne sont pas dissociables de l’acquisition des bonnes manières. Rien n’échappe à l’attention des éducateurs, rien n’est laissé au hasard : de la posture assise à la manière de tenir sa plume, tout se doit d’être maîtrisé pour faire de l’enfant autre chose qu’un singe costumé.
Dans le même temps, le XVIe siècle découvre qu’une tout autre enfance est possible, sous d’autres latitudes : des accouchements ont lieu sans recourir à aucune sage-femme ; un père s’occupe lui-même de nouer le cordon du nombril ; aucun nouveau-né n’est emmailloté dans des langes ni allaité par une nourrice. Si c’est un mâle, l’enfant est placé dans un hamac avec, à ses côtés, une petite épée de bois, un petit arc et de petites flèches garnies de plumes de perroquet. Cela se passe dans la baie de Rio de Janeiro où Jean de Léry a passé plusieurs mois, accueilli par une tribu « sauvage », en 1557-1558.
Quand ils grandissent, les garçonnets tupinambas évoluent à l’aise dans des corps fermes, souples, potelés qui émerveillent l’auteur de l’Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil (1578). Cette « petite marmaille » a l’esprit délié et des mouvements aussi vifs que les lapins de garenne de chez nous. Ni les arts libéraux ni les cours de maintien ne semblent lui manquer beaucoup…
Dresser, éduquer, civiliser
Peu de choses sépare le petit enfant du jeune chiot avec lequel il prend plaisir à jouer. C’est ce qui apparaît à la lecture du chapitre sur la prime enfance du géant Gargantua : celui-ci laisse ses frétillants compagnons de jeux se servir sans vergogne dans son écuelle et se frotte à eux dans des caresses réciproques où des babines sont léchées et des nez égratignés.
Que l’enfant et le chiot aient beaucoup en commun, c’est aussi ce que laisse entendre le contemporain de Rabelais qu’est l’humaniste Juan Luis Vivès (1492-1540). Dans ses Dialogues latins (1538), dont le propos est très concret, sont abordées les règles d’hygiène concernant l’enfant : comment se peigner, se laver, se vêtir. On y évoque aussi les règles de maintien dans les situations de la vie quotidienne : se tenir droit, faire la révérence, être modeste et circonspect devant un supérieur, etc.
L’auteur brosse autant de petites scènes prises sur le vif. Ce faisant, nous voici dans le foyer du jeune Tullius : le garçon est accueilli par son petit chien, Ruscio, qui lui fait fête en remuant la queue. Alors que l’enfant, tout excité, propose à manger à son chien tout en s’extasiant sur son intelligence, le père du garçon intervient et lui demande s’il pourrait dire en quoi il est vraiment différent de son animal de compagnie. L’enfant reste perplexe. En vérité, tant qu’il n’est pas allé à l’école, il tient de la bête plus que de l’homme. C’est pourquoi le père s’empresse de conduire son fils au collège et en saluant le maître, il a ce mot révélateur : J’amène ce mien fils vers vous, afin que d’une bête vous fassiez un homme.
À partir du XVIe siècle, se multiplient en Europe les manuels de civilité et autres traités de savoir-vivre à destination des jeunes personnes. Pas question de laisser son fils traîner dans les rues et s’adonner au jeu, comme le font les gueux ou les jeunes pages débauchés des romans picaresques du XVIIe siècle.
L’institution scolaire est concernée, mais aussi la vie domestique. Traitant de la civilité morale des enfants, Erasme ne se contente pas de mettre l’accent sur la piété qui sied à l’enfance: : il condescend à parler de choses aussi triviales que de la manière de se moucher ou d’éternuer. C’est que la connaissance de l’alphabet, puis la pratique des arts libéraux ne sont pas dissociables de l’acquisition des bonnes manières. Rien n’échappe à l’attention des éducateurs, rien n’est laissé au hasard : de la posture assise à la manière de tenir sa plume, tout se doit d’être maîtrisé pour faire de l’enfant autre chose qu’un singe costumé.
Dans le même temps, le XVIe siècle découvre qu’une tout autre enfance est possible, sous d’autres latitudes : des accouchements ont lieu sans recourir à aucune sage-femme ; un père s’occupe lui-même de nouer le cordon du nombril ; aucun nouveau-né n’est emmailloté dans des langes ni allaité par une nourrice. Si c’est un mâle, l’enfant est placé dans un hamac avec, à ses côtés, une petite épée de bois, un petit arc et de petites flèches garnies de plumes de perroquet. Cela se passe dans la baie de Rio de Janeiro où Jean de Léry a passé plusieurs mois, accueilli par une tribu « sauvage », en 1557-1558.
Quand ils grandissent, les garçonnets tupinambas évoluent à l’aise dans des corps fermes, souples, potelés qui émerveillent l’auteur de l’Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil (1578). Cette « petite marmaille » a l’esprit délié et des mouvements aussi vifs que les lapins de garenne de chez nous. Ni les arts libéraux ni les cours de maintien ne semblent lui manquer beaucoup…
Dresser, éduquer, civiliser
Peu de choses sépare le petit enfant du jeune chiot avec lequel il prend plaisir à jouer. C’est ce qui apparaît à la lecture du chapitre sur la prime enfance du géant Gargantua : celui-ci laisse ses frétillants compagnons de jeux se servir sans vergogne dans son écuelle et se frotte à eux dans des caresses réciproques où des babines sont léchées et des nez égratignés.
Que l’enfant et le chiot aient beaucoup en commun, c’est aussi ce que laisse entendre le contemporain de Rabelais qu’est l’humaniste Juan Luis Vivès (1492-1540). Dans ses Dialogues latins (1538), dont le propos est très concret, sont abordées les règles d’hygiène concernant l’enfant : comment se peigner, se laver, se vêtir. On y évoque aussi les règles de maintien dans les situations de la vie quotidienne : se tenir droit, faire la révérence, être modeste et circonspect devant un supérieur, etc.
L’auteur brosse autant de petites scènes prises sur le vif. Ce faisant, nous voici dans le foyer du jeune Tullius : le garçon est accueilli par son petit chien, Ruscio, qui lui fait fête en remuant la queue. Alors que l’enfant, tout excité, propose à manger à son chien tout en s’extasiant sur son intelligence, le père du garçon intervient et lui demande s’il pourrait dire en quoi il est vraiment différent de son animal de compagnie. L’enfant reste perplexe. En vérité, tant qu’il n’est pas allé à l’école, il tient de la bête plus que de l’homme. C’est pourquoi le père s’empresse de conduire son fils au collège et en saluant le maître, il a ce mot révélateur : J’amène ce mien fils vers vous, afin que d’une bête vous fassiez un homme.
À partir du XVIe siècle, se multiplient en Europe les manuels de civilité et autres traités de savoir-vivre à destination des jeunes personnes. Pas question de laisser son fils traîner dans les rues et s’adonner au jeu, comme le font les gueux ou les jeunes pages débauchés des romans picaresques du XVIIe siècle.
L’institution scolaire est concernée, mais aussi la vie domestique. Traitant de la civilité morale des enfants, Erasme ne se contente pas de mettre l’accent sur la piété qui sied à l’enfance: : il condescend à parler de choses aussi triviales que de la manière de se moucher ou d’éternuer. C’est que la connaissance de l’alphabet, puis la pratique des arts libéraux ne sont pas dissociables de l’acquisition des bonnes manières. Rien n’échappe à l’attention des éducateurs, rien n’est laissé au hasard : de la posture assise à la manière de tenir sa plume, tout se doit d’être maîtrisé pour faire de l’enfant autre chose qu’un singe costumé.
Dans le même temps, le XVIe siècle découvre qu’une tout autre enfance est possible, sous d’autres latitudes : des accouchements ont lieu sans recourir à aucune sage-femme ; un père s’occupe lui-même de nouer le cordon du nombril ; aucun nouveau-né n’est emmailloté dans des langes ni allaité par une nourrice. Si c’est un mâle, l’enfant est placé dans un hamac avec, à ses côtés, une petite épée de bois, un petit arc et de petites flèches garnies de plumes de perroquet. Cela se passe dans la baie de Rio de Janeiro où Jean de Léry a passé plusieurs mois, accueilli par une tribu « sauvage », en 1557-1558.
Quand ils grandissent, les garçonnets tupinambas évoluent à l’aise dans des corps fermes, souples, potelés qui émerveillent l’auteur de l’Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil (1578). Cette « petite marmaille » a l’esprit délié et des mouvements aussi vifs que les lapins de garenne de chez nous. Ni les arts libéraux ni les cours de maintien ne semblent lui manquer beaucoup…